Exposition En Pistes

Vernissage le samedi 7 décembre à 15h.
Ouvert de 14h à 18h le dimanche 8, le samedi 14 et le dimanche 15 décembre ainsi que sur rendez-vous.

 

avec Jean-Max Abrial/Caroline Deléage Monteil/Charly Pouderoux,
Régine Mondon
Arlette SimonClio Simon et Marc Simon.
commissaire d’exposition : Leïla Simon

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Jean-Max Abrial/Caroline Deléage Monteil/Charly Pouderoux, Le Suc de Sara, installation vidéo.

 

VISUEL def_le bruissement de la parole_Clio Simon
Clio Simon, Le Bruissement de la parole, Chili, 2013, film, 17mn.

 

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Arlette Simon, Périglaciaire, 2013, céramique, néon, boule à facette, bande son Félix Blume : Poteau éolien, 13mn.

 

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Régine Mondon, Topos, 2013, matériaux mixtes

 

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Marc Simon, Démons et Merveilles : Rouge, 2013, céramique et vidéo

 

En Pistes

Définitions sélectionnées de piste :
– Trace laissée suite à un passage.
– Indice qui guide quelqu’un dans une recherche et doit le conduire à quelque chose.
– Chemin, voie.
– Scène dans le monde du spectacle vivant.
– Morceau de musique sur un support tel que CD, vinyle…

Définitions qui en découle :
– Circulation – Mouvement ­ Voyage – Paysage – Découvertes – Frontière – Sensation ­ Partition.

L’installation  Suc  de  Sara  réalisée  par  Jean-­Max  Abrial  /  Caroline  Deléage  Monteil / Charly Pouderoux est constituée de quatre guérites. Les trois premières, dressées telles des sentinelles, annoncent la quatrième qui s’en distingue par sa grande taille et sa position horizontale. L’idée de frontière paraît évidente : être  à  la  frontière  de  deux espaces,  de deux mondes,  mais être aussi  proche  de quelque  chose  d’inaccessible.  Le  sentiment d’un paysage abandonné  est complété par ce déferlement d’images projetées à l’intérieur de la quatrième guérite. On y perçoit un personnage  franchissant  des  portes.  Mais  alors qu’il  pourrait  nous  guider,  nous montrer un passage possible, ses apparitions subtilisées par ses disparitions nous laissent un sentiment de distance. Il en est de même avec la vidéo, De l’orée trop sombre d’une mer trop sèche, de Anje Macdaniel. Un homme nu sur la plage ouvre des portes imaginaires. Il s’avance au bord de la mer et  observe quelque  chose  se situant  hors­-champ,  puis  il  repart  et  referme  ces  mêmes portes imaginaires.    A  aucun moment  nous ne  voyant  son visage.  Ce  sentiment  de  proximité inaccessible  est accentué  par  la création sonore  diffusée  dans  tout  l’espace  où  des  sons,  qui nous sont pourtant familiers, se retrouvent perturbés par la composition mise en place. Heurtés et bouleversés  ils deviennent difficilement identifiables, et de ce fait insaisissables.

Le  son  détient  également  une  place  importante  dans  le  film  de  Clio  Simon.  Intitulé Le Bruissement  de  la  parole,  il  prend  pour partition  le  récit  des  Paroles  gelées  de Rabelais  qui restitue  peu  à  peu  à  l’oreille  des  batailles  passées et  questionne  des catastrophes  à  travers différentes strates temporelles. Clio Simon prend ici pour cadre le Chili, cependant le message reste à portée universelle.  Le film se déroule dans le désert d’Atacama, un lieu chargé d’Histoire où des chantiers archéologiques y ont révélé des traces datant d’avant la colonisation espagnole. C’est  aussi ici que  les  Disparus  de  la  dictature de Pinochet  ont  été  exécutés  et enterrés secrètement. Ce désert est ainsi exploré, scruté par les archéologues, les historiens, les proches des disparus à la recherche de traces…
Le Bruissement de la parole nous dévoile les quêtes d’un passé qui ne passe pas où la mémoire détient un rôle essentiel. Ce projet est en effet « travaillé par la mémoire avec tout ce que cela induit de fiction, le souvenir est tronqué, altéré, incertain. L’acte de mémoire est ici reconstitution, source de bégaiement et d’interprétation. » (Clio Simon)

Nous retrouvons aussi l’idée de trace dans les dessins de Régine Mondon. Cette fois-ci il s’agit de la trace d’un paysage déposée dans le souvenir et aussi  par  les  gestes  de  l’artiste. Topos est une installation où s’opère une réflexion sur le dessin via divers supports. Le dessin envahit l’espace qui lui-même devient ainsi Dessin. L’espace permet de créer la ligne, élément important dans le travail de Régine Mondon. En effet ces lignes rouges sont une même figure répétée créant une variation. La phrase de Jean-Marie Gleize vient compléter cette déclinaison. Ces lignes, tels des horizons à l’équilibre silencieux et délicat, suggèrent et structurent un paysage à expérimenter. La légère, presque imperceptible discontinuité de la ligne demande à prendre le temps de la découvrir. Alors que l’installation Suc de Sara nous tient volontairement à distance provoquant en nous un sentiment de frustration, ici, le spectateur, tel un funambule, souhaite rester dans cet infime interstice à la limite du plein et du vide, frôlant la disparition, effleurant le Rien.

Avec l’installation Démons et Merveilles Rouges : Ila, Marc Simon invente une nouvelle mythologie à partir de ses lectures, de sa connaissance de l’Histoire et de l’Histoire de l’art, de ses voyages, de son imaginaire… Nous avons l’impression d’avoir tout juste manqué la fermeture du passage passant d’un monde à un autre. En effet les personnages d’aspect tellurique semblent sortir depuis peu de la matière. Leur surface, qui à la fois attire et effraye, est imprégnée du mouvement de l’acte « créatif ». Ces sculptures  à  la  beauté  fantastique sont  un  mélange  de  formes  accidentée,  mi­ humaine  mi­ animale, rocheuse,  volcanique. L’image en mouvement projetée tout autour évoque un univers sylvestre installant les sculptures dans un monde onirique et fantastique. On ressent du drame, le tourment du romantique mais également la passion de vivre. Il en découle ainsi de la poésie, une nouvelle cosmogonie.

Il  est  aussi  question  de  matière  dans Périglaciaire  d’Arlette  Simon  mais  cette  fois-­ci avec un intérêt  pour  la transparence,  les  jeux  de lumière,   de reflet,  de  circulation  et d’enchevêtrement possibles. La diffusion de la bande son de Félix Blume, Poteau éolien et la lumière bleutée des néons  parsemée  de  taches  colorées  de  la  boule  à  facette enveloppent  les  plaques  et  les serpentines blanches en céramique. Ce jeu de lumière vient révéler les différences de matière, de surface qui  selon les endroits peut être mate, brillante, légèrement poreuse, lisse ou avec des coulées. L’évocation  dans  le  titre  d’un paysage glacé est  intensifiée  et  multipliée  par  les différentes teintes de blanc des éléments en céramique sur lesquels glisse la froideur bleutée des néons.  Cette  installation développe  des mouvements dansés  aux  circulations  sinueuses, circulaires et traversantes. Périglaciaire, nous propose ainsi un paysage où le sonore et le visuel deviennent aussi tactiles.

Leïla Simon,
Commissaire de l’exposition En Pistes à Eac Les Roches, 2013